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Russ Meyer, l'intégrale !

Que les obsédés sexuels français se calment ! Que les cinéphiles amoureux des poitrines XXL sèchent leurs larmes car malheureusement l'intégrale Russ Meyer (1922-2004) n'est pas sous titré dans notre langue pour la bonne et simple raison que le coffret provient de l'excellent éditeur anglais Arrow Films.


Précédemment disponible dans un coffret tout aussi énorme que les poitrines des actrices des Russ Meyer, Arrow offre un coffret relifté, aminci et bien plus pratique à ranger pour le collectionneur en manque de place. Ajoutez à cela des nouveaux bonus, l'amateur du cinéma généreux de Russ Meyer devra mettre la main à la poche pour acquérir ce qui semble être le coffret ultime pour appréhender l’œuvre de ce cinéaste indispensable.

Détails des bonus :
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> livret du biographe et ami de Russ meyer, David K. Frasier (auteur du livre Russ Meyer, The Life and Films) avec des interviews jamais publiées de King Leer (surnom de Meyer)
> commentaire audio des Pussycats pour Faster Pussycat Kill Kill
> Commentaire audio de Russ Meyer sur Vixen, Supervixens, Beneath the Valley of the Ultravixens (Ultra Vixen en V.F.) et Faster Pussycat Kill Kill
> Vixen Featurette
> Album photo d'Erica Gavin
> Featurette sur Kitten Natividad
> Interview de Kitten Natividad
> Interview de Russ Meyer par Jonathan Ross
> Featurette avec Raven Delacroix
> Go Pussycat Go
> Bande-annonces

Pour les plus réfractaires à la langue anglaise, les éditions simples de Motor psycho, la saga Vixen, Faster Pussycat Kill Kill sont toujours disponibles, mais ce n'est que la partie émergée de la filmographie de Russ Meyer. Espérons qu'un éditeur français (indépendant ?) décide de proposer le restant de sa riche carrière. Comme nous sommes dans l’espérance, souhaitons qu'un jour, un éditeur français se décidera à rééditer ce livre écrit par Jean Pierre Jackson en 1982 et qui reste à ce jour l'un des plus complet dans la langue de Molière.


"Russ meyer ou 30 ans de cinéma Érotique à Hollywood" raconte l'histoire étonnante de ce genre encore sous-évalué, depuis les bandes naïves ou clandestines des débuts jusqu'aux films pornographiques d'aujourd'hui, passant successivement par le film nudiste, de strip-tease, le "nudie", le film "sexy" et le "soft-core".
Et surtout, ce livre est une première mondiale ! Il présente enfin au public le meilleur, le plus connu et le plus original des réalisateurs érotiques américains : RUSS MEYER. Fruit d'une amitié personnelle avec ce cinéaste provocateur et drôle, cet ouvrage éclaire à la fois tout un pan de l'histoire du cinéma américain et jette une lumière inédite sur certains aspects de la vie hollywoodienne.


Pour finir, nous ne résistons pas à vous proposer deux critiques de film signées Luc Arbona extraites des pages télé des Inrockuptibles mais qui parlent en creux plus de style et de thématique que des films en soi. Quant à nous, Russ Meyer - maitre d'un cinéma pop- était un cinéaste avant-gardiste voire progressiste, peut-être même le réalisateur féministe par excellence.

Montagnes Russ
Quand un cinéaste monomaniaque et fétichiste réduit son style à une image, son art tien de l'idolatrie religieuse. Meyer en Wagner de la pop culture.
Au début, il y avait l'ennui. Un désert infesté de scorpions et de vipères, quelque part très à l'Ouest, du côté de la vallée de la Mort. Un jour, une baraque s'est installée. Des strip-teaseuse aux seins extraordinaires en sont sorties. Elles se débattaient avec quelque chose d'invisible comme gênées par leurs encombrants poumons. Elles se cabraient, se déhanchaient sur un air de twist, furieuses mais ravies. Russ meyer est arrivé. Fasciné par ces amazones catcheuses prêtes à l'attraper par les couilles, le cinéaste n'a plus eu qu'une obsession : faire des images, multiplier les panoramiques, célèbre ces walkyries de fête foraine. Quand il est question d'un film de Russ Meyer, quel qui soit, il est quasiment impossible de dépasser tous ces clichés. Normal, son cinéma, véritable iconologie des poitrines explosives pourrait se résumer à une avalanche de clichés. [...]
Avec une constance religieuse, de 1959 à 1976, Russ Meyer n'a jamais eu qu'une obssession : faire rentrer Las Vegas dans un soutien-gorge. En cela, le cinéaste s'impose comme un prêtre païen, véritable Wagner californien de la pop culture.


Combien de fois faut-il faire l'amour ? [Common Law Cabin (1967)] in Les Inrockuptibles #461 - sept/oct; 2004 p.109

Western Femelle
"Je ne déteste pas les muscles, mais le pognon c'est mieux !" Cette réplique, tout droit sortie de la bouche haineuse de Varla, la brune tueuse aux seins bandés comme des zeppelins de Faster Pussycat ! résume toute la grâce malsaine de ce chef-d’œuvre incontestable de Russ Meyer [...]. C'est sur cette grammaire de la soif de toute puissance que repose le film : J'en veux ! J'en veux tout plein ! De la baston en plein soleil, des gros calibres à la ceinture, de la sueur, du cuir, de la poussière : Faster, Pussycat ! reprend tous les gimmicks du western et réinterprète les codes de ce cinéma de propagande destiné à chanter la geste mythique de la conquête de l'ouest. Il remplace les machos burinés à cheval par des survireuses déchainées au volant de Porsche-fusées. Au beau milieu du désert, dans une fermette isolée, débarquent trois de ces femelles furieuses au rimmel impeccable, véritables kalachinovs à vagin, résolues à envoyer des dérouillées à tout ce qui bouge. C'est ultra efficace. Normal, les ressorts sont exactement ceux du western, ceux d'une propagande / publicité qui ne fait que sublimer une seule et même rhétorique : de la violence avant tout chose. Vas-y Minette, Tire ! Tire ! Il serait même tentant de se mettre à genoux devant l'esthétique sauvage de ce film : le grain gris-bleu de sa photo impeccable, son iconologie cuir crypto lesbienne, ses contre-plongées vertigineuses, ses chorégraphies de jiujitsu, etc. De Mondino à Kill Bill en passant par les Cramps, un film qui s'impose comme un western matrice.

Faster, Pussycat ! Kill ! Kill ! in Les Inrockuptibles #480 - Février 2005, p.102

source : Arrow / Les Inrockuptibles

Rétro-viseur : Silent Running (1972)

Déjà disponible en France dans une édition simple, dénué de tout bonus, le premier film du spécialiste des effets spéciaux Douglas Trumball (2001, l’odyssée de l'espace, Blade Runner, Tree of Life) se voit offrir une édition collector... outre manche et exclusivement en blu-ray.


En 1969, Douglas Trumbull n'a pas encore oeuvré sur Rencontre du 3ème type et Star Trek, le film, mais il est déjà catalogué à Hollywood comme "génie technologique ultime" pour avoir, dès ses 26 ans, révolutionné l'utilisation des effets spéciaux avec 2001 l'odyssé de l'espace. La SF cinématographique est alors promise à l'âge adulte, d'autant que les campus connaissent au même instant une vague de littérature et bédé de SF new-age hautement iconoclaste, volontiers poilitique et philosophique (K. Dick, Clarke, Silverberg, Herbert, etc...) et qui enterre sans menagement le scientisme optimisme des années précédentes. Trumbull s'engage dans la mouvance et profite d'une opportunité unique pour imposer à Universel un projet de SF hors du commun. En effet, le succès cosmique d'Easy Rider a fait l'effet d'une bombe, et les majors, complètement à la masse sur les nouvelles attentes du jeune public, distribuent de l'argent à tour de bras. Chez Universal, avec la garantie d'un budget inférieur à 1 million de dollars, tout réalisateur débutant peut proposer son projet fou, faire son film sans rendre de comptes, et bénéficier du final cut (!!!). Et l'on se doute que peu de gens sur place, ont dû comprendre quoi que ce soit au synopsis que leur dépose le jeune Trumbull : un groupe d'ouvrier de l'espace transporte dans d'énormes serres les derniers échantillons de flore terrestre. En leur sein, le lunatique Freeman Lowelln qui se révèle plus intime avec les plantes et les drones du vaisseau qu'avec ses collègues fonctionnaires. Lorsque, de la Terre, vient l'ordre de détruire les serres, Freeman est effrayé par la portée du geste et refuse d'annihiler le dernier paradis terrestre dans l'univers. (ATTENTION SPOILER NDR) Il assassine ses collègues et fait croire que le vaisseau a explosé en larguant des pièces (tactique de sous-marin dénommé le "Silent Running"). Il va désormais errer dans l'espace avec, pour seuls compagnons, les drones qu'il a re-programmés... (FIN DE SPOILER)
Pour donner coprs à son rêve étrange, Trumbull s'entoure de deux scénaristes qu'il estime prometteur, un certain Michael Cimino (futur Oscarisable) ainsi qu'un dénommé Steve Bochco (créateur d'Hill Street Blues, NYPD Blues, La loi de Los Angels, City of Angels, Murder One, ouf !...). Ces derniers vont notamment dévelloper les caractéristiques de la vie en groupe, qui redefinnissent de font en comble l'image jusqu'à alors usitée de l'équipage spatial militarisant. Avec un budget ric-rac et toute l'ingéniosité scientifique du monde, Trumbull accouchera de son côté d'une plétgore d'effets spéciaux réellement poussées pour l'époque (transparence en tout genre, incrustation des acteurs dans les maquettes, etc...). De plus, l'équipe trouve l'occassion de loer pour une bouchée de pain un ancien porte avion de l'US Navy, qu'ell redecore avec soin. Cette opportunité sera également lourde de conséquences dans le look normalisé du vaisseau spatial, aux antipodes de la rutilance flashy jusqu'alors servie par le ciné de SF. Et si l'on excepte les emprunts les moins pertinents à la culture pop d'alors (Joan Baez sur fond d'étoiles !), Silent Running se pose royalement comme le parrain thématique et esthétique des films de SF qui allaient traumatiser la fin de la décennie 70, Alien en tête.
Sortie en 1971 (72 en France), le film sera, comme on s'en doute, un échec (pour un millionième du budget, le Dark Star de Carpenter sera finalement plus rentable) compromettant lourdement la carrière du cinéaste Trumbull. Ses futurs projets seront jugés à l'aune de celui-ci, et généralement écartés lorsque trop "farfelus" (y compris lorsqu'en plein 70's, il proposait aux studios i, système de jeu scénarisé interactif en 3D, ingénieusement baptisé "videogame"). [...]


Rafik Djoumi in Mad Movies #145 - septembre 2002, page72

A l'heure actuelle, nous ne connaissons pas la liste des suppléments qui figureront sur le blu-ray. Nous espérons grandement que certains bonus de l'édition collector zone 1 seront repris comme le commentaire audio et le making of (Making Silent Running).

Sortie prévue : novembre 2011.

Le dvd Français est en vente auprès de THE END, nous espérons proposer le blu-ray anglais (normalement sous-titré anglais). Pour plus d'infos, contactez-nous par mail à theendstore(at)gmail(point)com

Independenza ! Part 18 : Survivance

Alors que les supermarchés culturels bradent à tout va les films les plus commerciaux, certains éditeurs résistent, persistent et signent fièrement leur indépendance. Depuis le 1 février 2011, date de sortie de leur premier dvd (Syndromes and a Century d'Apichatpong Weerasethakul), Survivance a rejoint les rangs de ces courageux labels qui n'ont écouté que leur passion et leur curiosité pour sortir en dvd des films rares, récent ou ancien, pour compléter l'offre d'un cinéma indépendant, libre et aventureux. Cela valait bien un petit focus à l’occasion de leur troisième dvd, Le Journal de David Holzman de Jim McBride, réalisateur de Made In USA (remake d'A Bout de souffle et accessoirement film culte pour Quentin Tarantino).

Le Journal de David Holzman - Jim McBride
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Pour mieux comprendre sa vie et puisque selon Godard « le cinéma c’est 24 fois la vérité par seconde », David Holzman, apprenti cinéaste dans le New-York des années 60 commence son journal filmé. Revoir le film de sa vie lui permettra peut-être d’en saisir le sens. Mais David Holzman va vite comprendre que l’omniprésence de la caméra dans son quotidien n’est pas sans influence sur le cour de son existence…

Tourné en 1967, Le Journal de David Holzman fait date dans l’histoire du cinéma. Le geste assez est assez important pour faire entrer le film au Registre national du film de la Librairie du Congrès, liste de d’œuvres clés du 7ème art. Précurseur du genre « documenteur », les premiers spectateurs y distinguent mal ce qui relève du documentaire et de la fiction. Passerelle entre les genres, réflexion sur l’altération du réel par l’acte de filmer, Jim McBride livre un film à la fois réflexif et léger, sensuel et cérébral. Quarante ans après sa réalisation, le film ne cesse d’être étudié et redécouvert. Il s’agit d’un des premiers (le premier ?) films de fiction qui cherche pleinement à se faire passer pour un documentaire en égrainant tous les indices du genre. Si le procédé du « faux documentaire » nous paraît aujourd’hui commun et a participé à la singularité ou au succès de films aussi divers que L’Ambassade (Chris Marker), Punishment Park (Peter Watkins), F for Fake (Orson Welles), C’est arrivé près de chez vous (Rémy Belvaux, André Bonzel & Benoît Poelvoorde), Le Projet Blair Witch (Daniel Myrick & Eduardo Sánchez) ou dernièrement Faites le mur ! (Banksy), Le Journal de David Holzman reste précurseur du genre et l’un des plus subtile, parce que l’artifice se double toujours d’une réflexion sur le cinéma. A l’apogée du cinéma direct, Jim McBride avait voulu en réaliser un exercice critique, montrer que le documentaire restait une affaire de mise en scène et de point de vue, en somme qu’il fallait toujours se méfier de "ce qui fait vrai", de l’apparente objectivité du caractère enregistreur de la caméra. Ironiquement, le David Holzman du film affirme, en hommage à Godard, que « le cinéma c’est la vérité 24 fois par seconde »… ce qu’en fait le film met un soin pervers à démentir. La grande force du film est aussi de réfléchir sur la dimension voyeuriste du cinéma, sur ce qu’il se passe lorsqu’on filme l’intime.
Dans L’Epreuve du réel à l’écran (De Boeck), François Niney rappelle à ce titre que le film de McBride démontre « que pour être autre chose que du voyeurisme et de l’exhibitionnisme, le cinéma-vérité ou le cinéma direct exigeant soit la mise en scène d’un véritable dispositif d’échange entre filmer et filmés, (comme chez Rouch), soit la construction d’un espace objectif où puissent évoluer, se parler et se faire entendre les protagonistes, comme chez Wiseman […] Car la caméra subjective monomane ne laisse d’autre échappatoire aux filmés que d’être ses proies plus ou moins consentantes ou bien de l’éconduire. »


Jim McBride est né en 1941 à New-York où il fait également ses études de cinéma après un passage par Sao Paulo. Il côtoie assidûment dans les années 60 la Filmaker’s Cinematheque de Jonas Mekas où il voit les films de Stan Brakhage, Andy Warhol et de Shirley Clarke. Il se familiarise aussi avec le cinéma direct en plein essor, les films de Pennebaker et des frères Maysles en particulier. On retrouve bien entendu dans Le Journal de David Holzman (1967), son premier film, des traces de cet apprentissage avant-gardiste et documentaire. Le film est co-écrit avec Kit Carson qui interprète aussi le rôle-titre. Trouvant le film trop court, le producteur demande à Jim McBride de le coupler avec un court métrage. Jim McBride a ainsi l’idée de My Girlfriend’s Wedding où il interroge sa petite amie, Clarissa, au moment où celle-ci doit se marier, afin de pouvoir rester aux Etats-Unis, avec un militant pour la paix au Viêt-Nam. Le film durera finalement 1h. En circulant dans les plus grands festivals, les deux films acquièrent rapidement un statut culte tout en étant largement invisibles pour le grand public.

S’en suit pourtant une période trouble où Jim McBride peine à faire aboutir ses films, dont un projet de western à la structure ambitieuse produit par Bob Rafelson (Five Easy Pieces) et qui devait un temps être repris par Dennis Hopper. Il réalise tout de même Hot Times (1974) dont le slogan mercantile était « American Graffiti mais avec du sexe. ». Sont aussi réalisés, en 1971, Pictures From Life’s Other Side (qui clôt la trilogie « du journal filmé » entamée avec David Holzman) et Glen and Randa (1971), film de science-fiction intimiste, post apocalyptique.

Jim McBride attendra dix ans avant de faire aboutir un nouveau projet, le remake américain d’A Bout de Souffle de Jean-Luc Godard. Breathless – Made in USA avec Valérie Kaprisky et Richar Gere est produit à hollywood. Jim McBride côtoie d’ailleurs brièvement Godard à la fin des années 70 quand ce dernier envisage de réaliser son film américain produit par Coppola. Jim McBride réalise par la suite essentiellement des films pour la télévision. Il réalise notamment en 2001 un épisode de la série Six Feet Under. Il continue tout de même à réaliser des films de cinéma dont The Big Easy, polar avec Dennis Quaid et Great Ball of Fires, biopic de Jerry Lee Lewis qui rencontrent un certain succès.

En 2007, Jim McBride fait une courte apparition dans Les Plages d’Agnès d’Agnès Varda, son amie de longue date.


Bonus
> My Girlfriend’s Wedding (1969) - 61 min - VOSTF
> My Son’s Wedding to my Sister-in-Law : un post-scriptum inédit de Jim McBride (2008) - 9 min
> Analyse par François Niney (20 min)
> Livret (32 pages) : Interview & texte par Jonathan Rosenbaum, David Holzman vu par Julia Rolland (carnet d’illustrations)

Syndromes and a Century - Apichatpong Weerasethakul
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En Thaïlande, dans un hôpital de campagne, le Docteur Toey, une jeune médecin, ne répond pas aux timides avances d'un collègue. Pour le réconforter, elle lui raconte son propre amour déçu pour un fleuriste, spécialiste des orchidées. En Thaïlande, dans un hôpital sophistiqué et urbain, Toey est confrontée aux avances du même collègue amoureux. L’histoire et le film semblent se répéter et pourtant…

Avec sa césure centrale, Syndromes and a Century rejoint les deux précédents films du réalisateur, Blissfully Yours et Tropical Malady, pour former une trilogie de films-diptyques. Syndromes and a Century est un film où les sentiments ne cessent de circuler, insaisissables et flottants à l’image de ses personnages. Un monde où passé et présent s’entrelacent, où les patients y soignent leur médecin, où les moines se rêvent DJ, les dentistes en crooners, et où une chanson pop se mue en prélude pour guitare : "Apichatpong Weerasethakul, Ovide du 21ème siècle" comme le décrit Dominique Païni.


Bonus
2 Courts-métrages

> Luminous People (2007) - 15 min
Ce film fait écho de plusieurs façons à Syndromes and a Century. Tourné en super-8, Luminous People est lui aussi un film de célébration des ancêtres et de leur réminiscence. On y retrouve condensé en quelques minutes ce goût du "primitif" mêlé à une modernité de forme. Un groupe de personnes descend le Mékong en bateau, longeant la frontière entre la Thaïlande et le Laos. Ils naviguent contre le vent, préparant une cérémonie funéraire…

> Diseases and a Hundred Year Period de S. Chidgasornpongse (2008)- 20 min
Diseases and a Hundred Year Period est un ciné-tract qui nous vient de Thaïlande. Il est réalisé par Sompot Chidgasornpongse, assistant de Weerasethakul sur plusieurs de ses films (dont Syndromes and a Century), en réaction à la censure de Syndromes and a Century en Thaïlande.

> Introduction (5 min)
> Livret 24 pages : analyse inédite du film par Antony Fiant, entretien avec Tony Rayns

Images du monde et inscription de la guerre / En sursis - Harun Farocki
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"Il faut être aussi méfiant envers les images qu’envers les mots. Images et mots sont tissés dans des discours, des réseaux de significations. Ma voie, c’est d’aller à la recherche d’un sens enseveli, de déblayer les décombres qui obstruent les images."
Harun Farocki

Dans Images du monde et inscription de la guerre et En sursis, Harun Farocki s’arrête sur deux corpus d’images de la Shoah et nous les rend lisibles grâce à deux stratégies de reprise. Un dialogue entre deux films s’instaure à vingt ans d’intervalle et s’y dessinent deux réponses formelles à la question de la place du savoir visuel dans notre connaissance de l’Histoire. « A partir de dispositifs différents, les deux films de Harun Farocki invitent à cette traversée du visible » écrit Sylvie Lindeperg.
Images du monde et inscription de la guerre, film-phare de Harun Farocki, est un essai dont le motif central est la photographie aérienne du 4 avril 1944 du camp d’Auschwitz prise par un avion de reconnaissance américain. Sur cette photographie, les analystes identifièrent les usines environnantes mais pas le camp d’extermination. Montage dialectique et commentaire distancié composent ce brillant essai documentaire qui analyse les conditions de lisibilité des images, du "voir" et du "savoir", entrelace polysémie des mots et des photographies.
En sursis exhume des rushs d’un film inachevé tourné dans le camp de Westerbork (Pays-Bas) en 1944 par un prisonnier juif. A l’opposé des transformations télévisuelles de l’archive, le film puise les traces infimes laissées par l’image et convoque leur hors-champ pour atteindre ce « sens enseveli » et rendre notre savoir « plus précis, plus incarné, plus tranchant » comme l’évoque Georges Didi-Huberman.


Bonus
> Images du monde et inscription de la guerre / Bilder der Welt und Inschrift des Krieges / Images of the World and the Inscription of War : 75 min, 1988
> En sursis / Aufschub / Respite : 40 min, 2007, muet
> Entretien croisé avec Christa Blümlinger et Sylvie Lindeperg ( 60 min)
> Livret 52 pages : textes de Harun Farocki, Christa Blümlinger et Sylvie Lindeperg

Voilà, vous savez tout (ou presque ) sur les trois premiers dvds de Survivance. Trois films qui témoignent des orientations et des préoccupations du label, entre modernité et passé, entre fiction et documentaire, Survivance sera (et nous l’espérons) un acteur important pour les cinéphiles et les téméraires.

source : Survivance

La Vie est belle : L’Étrangleur / Paul Vecchiali

Discrètement, l'éditeur La Vie est Belle continue son travail de défricheur d'un certain cinéma français en exhumant un joyau devenu quasi invisible. Méconnu du grand public, Paul Vecchiali a du mal aujourd'hui à travailler dans un cinéma français nombriliste. Remercions donc le label de nous offrir, après Femmes Femmes du même auteur, L'Étrangleur, film à la poésie vénéneuse.

Présentation de l'éditeur :

Enfant, Émile croise, lors d’une fugue nocturne, un criminel qui étrangle sous ses yeux une femme en pleurs. Marqué à vie, il s’essaie, aux abords de la trentaine, de faire revivre cet instant « précieux ». Émile amasse ainsi dans la journée les renseignements nécessaires à l’accomplissement de ce qu’il ne croit pas être un crime.

A six ans, Paul Vecchiali découvre une photo de Danielle Darrieux dans Mayerling, d’Anatole Litvak (1936). Cette expérience fonde son désir de faire du cinéma. Polytechnique et les six années dues à l’Etat font patienter ce désir jusqu'à la réalisation en 1961 de Les Petits drames, film dont la seule copie est définitivement perdue. Il collabore par ailleurs au début des années 60 aux Cahiers du Cinéma. Son premier court-métrage Les Roses de la vie (1962), avec Jean Eustache, est produit par Roger Leenhardt.
Paul Vecchiali réalise son premier long-métrage en 1966, Les Ruses du Diable. L’admiration que lui voue François Truffaut lui fait dire du réalisateur qu’il est le seul véritable héritier de Jean Renoir. Le cinéma de Paul Vecchiali ne cessera alors de faire un pont entre deux héritages cinématographiques, celui des années 30 et de la nouvelle vague. Le court-métrage Les Jonquilles (1972) est écrit avec Noël Simsolo qui co-signe également le scénario de Femmes, femmes. Film largement autoproduit, Femmes, femmes invente une manière légère de faire du cinéma et aura un retentissement grandissant au fil des années. Pier Paolo Pasolini encense le film au festival de Venise et en fait une citation dans Salò. Via sa propre société, "Diagonale", Vecchiali produit et réalise ensuite des films à rythme très régulier, certains sulfureux comme Change pas de main (1975), La Machine (1977) ou Encore / Once More (1987). Dans En haut des marches (1983), il fait jouer la figure qui l’avait marqué enfant, Danielle Darrieux. Mais Paul Vecchiali, également auteur de nombreux films pour la télévision est aussi producteur. Il a produit au sein de sa société "Diagonale" Jacques Davila, Jean-Claude Guiguet, Gérard Frot-Coutaz, Marie-Claude Treilhou, Jean-Claude Biette etc, créant, là encore, un espace, un "style".
A vot’bon cœur, son dernier film sorti au cinéma, trouve une résonance particulière puisqu’il met en scène un réalisateur, joué par Paul Vecchiali, n’arrivant plus à financer ses projets, qui décide de tuer un par un les membres de la commission d’avance sur recettes. Depuis cette expérience, il continue de réaliser dans une indépendance totale.
En véritable encyclopédiste du cinéma, Paul Vecchiali a travaillé près de dix ans à un dictionnaire des cinéastes français des années 30. Une œuvre-somme, sortie en 2011 aux Editions de l’Oeil.


Bonus :
> Genèse - 4’
> Rencontre avec Paul Vecchiali - 19’
> Rencontre avec Jacques Perrin : 1- Mémoire 9’/ 2- Pudeur 8’

Prix : 20 euro (prix éditeur)

Pour commander envoyer un mail à theendstore(at)gmail.com

source : La Vie est Belle

Privilege / Peter Watkins / Swinging London

Dans le milieu de l'édition, la fidélité est rare, alors saluons le travail de Doriane Films qui propose le premier film de Peter Watkins en dvd sous titré dans la langue de Molière. Une sortie qui permet au cinéphile Français de "posséder" la quasi intégralité de l’œuvre du réalisateur anglais.

Dans le Londres des années 70, en plein "Swinging Britain", Steven Shorter (incarné par Paul Jones, le chanteur de Manfred Mann) est devenu un phénomène de musique pop. Sa popularité, gérée au plus près par des cadres de l'entreprise de show business qui l'emploie, a atteint des proportions vertigineuses. Mais quand l'artiste Vanessa Ritchie (jouée par le top model Jean Shrimpton) vient peindre son portrait, elle découvre sa profonde tristesse. C'est alors que les choses dérapent et que Steven se rebelle de façon inattendue.

Un film radical. Un film culte. Comme dans son film anti-nucléaire La Bombe, Peter Watkins nous projette dans un monde totalitaire et déshumanisé. La critique virulente des médias, du capitalisme débridé et du pouvoir politique corrompu a valu au film un accueil parfois mitigé, parfois violemment hostile. Il s'agit pourtant d'une œuvre visionnaire sur la manipulation des consciences - un film qui nous renvoie au monde dans lequel nous vivons aujourd'hui.

Disponible outre manche depuis janvier 2010, le dvd anglais proposait 2 court métrages (The Forgotten Faces, 1961 et The Diary of Unknow Soldiers, 1959) inclus dans le dvd français de Punishment Park, ainsi qu'un livret de l'historien Robert Murphy et du spécialiste de Peter Watkins, John Cook. L'édition française se voit accompagnée d'un livret exclusif de 16 pages comprenant une auto interview du réalisateur. 16 pages qui permettent de remettre le film dans son contexte et de se rendre compte du caractère sulfureux du film de part son thème (critique du star system) que de sa réception critique houleuse de part le monde.

Ironiquement, ces critiques des années 1960 déclarent que je suis un amateur, alors que mon travail a ensuite inspiré de nombreux réalisateurs de cinéma et de télévision. Elles enragent contre mes accusations de conformisme de l’Angleterre, alors qu’aujourd’hui, pour ne prendre qu’un exemple, le pays a passivement accepté l’installation d’un nombre de caméras de surveillance dans les lieux publics plus important que dans les rêves les plus fous du KGB ou de la Stasi. Cette information jette une lumière ironique sur la critique de Privilège parue dans The Sun : « Le gouvernement est un ; son slogan est « Nous obéirons ». Non, nous n’obéirons pas, tenez-vous le pour dit, M. Watkins. »
Peter Watkins



La sortie en France de Privilege permet de continuer l'after de l'Etrange Festival, car la manifestation lui rendit hommage en 1998, où le film fut projeté. Voici ce que le cinéaste disait à propos de ce premier film :

"Avec Privilège, Norman Bogner et moi-même, nous voulions montrer comment l'engagement et la détermination politiques des jeunes générations pouvaient être sapés par la religion, les média de masse, les jeux... C'est pour cette raison que nous avons filmée la destinée de Steve Shorter de manière aussi allégorique et emphatique. Lorsque le film est sorti en Angleterre, les critiques ont tiré à boulets rouges dessus. Privilège était, selon eux, un film «hystérique». Le fait que toutes les choses montrées ou sous-entendues par le film soient aujourd'hui devenues réalité en Angleterre ­ en particulier lorsque Margaret Thatcher a régné sur le pays ­ n'a pas pour autant réhabilité Privilège qui reste, aujourd'hui encore, un film marginalisé. Bien que le film a été accusé de plagier le style télé de l'époque, son utilisation de la couleur, sa structure et la mobilité de la caméra font aujourd'hui partie intégrante de l'écriture cinématographique des films dits "grands publics".



Le dvd est dès à présent disponible à la vente auprès de THE END. Tous les films de Watkins sont disponibles auprès de THE END :
Punishment Park / Culloden / La commune / The Gladiator / La bombe (coffret / unité) Edvard Munch / Evening Land / Le libre penseur (à l'unité)

Pour connaitre nos tarifs ou commander, envoyez un mail à theendstore@gmail(point)com.

Prix : Privilege / 20 euro (prix éditeur)

source : Doriane Films / Étrange Festival

José Mojica Marins | The Coffin Joe Collection

Pour faire suite à la présentation du coffret The Coffin Joe Collection, voici le portrait du réalisateur par un journaliste que nous affectionnons particulièrement à THE END, Jean-Baptiste Thoret paru dans Starfix, nouvelle génération.


L'horreur made in Brazil
Au Brésil, Jose Mojica Marins s'est surtout fait connaitre dans les années 60 grâce à un show télévisé, Ciné Trash, qu'il présentait sous les traits de Zé do Caixao (rebaptisé Coffin Joe en anglais). Méprisé par les classes moyennes de son pays (qui ne voyaient en lui qu'un imposteur hérétique à clouer au pilori), mais adulé par les classes populaires et les intellectuels, José Mojica Marins fut, historiquement, le père du cinéma d'horreur brésilien, et esthetiquement, le Glauber Rocha du genre. Depuis une trentaine d'années Marins est l'un des personnages publics les plus populaires au Brésil, grâce à ses films bien sûr, mais aussi à ses comics, ses disques, ses romans photo et surtout Zé do Caixao, son effigie, devenu même une ligne de produits déclinée en savons, vernis à ongles et shampoings.

Né en 1929 à Vila Anastcio, un quartier pauvre de Sao Paulo, Jose Mojica Marins tourne ses premiers films en 8mm grâce à une caméra que lui offre son pére. Les cirques de fortune et les arrières cours deviendront dès l'âge de 13 ans ses salles de projection. En 1953, il crée sa propre (et très modeste) compagnie de production et réalise en 1960 son premier long-métrage (un mélodrame). En 35 ans de carrière, Marins s'essayera à tous les genres : le detective movie, le film érotique, le film d'aventure (Sina do Aventureiro, premier film tourné en Cinémascope au Brésil) mais s'illustrera surtout dans le film d'horreur. Ignorée par la plupart des encyclopédie du cinéma, la carrière cinématographique de Marins prend son véritable élan en 1963. Suite à un rêve dans lequel il se vit trainé dans un cimetière par un individu en cape noire, il imagine le personnage de Zé do Caixo (littéralement "Zé du cercueil, l'entrepreneur de pompes funebres) qu'il met en scène dans ce qui devienda le premier film d'horreur brésilien, A Meia-Noite Levarei tua Alma (réalisé la même année que Carnival Of Souls de H. Hervey, autre grand film méconnu). Tour à tour sorcier illuminé, psychopathe sadique, prêtre cruel de l'horreur zaroffienne, Zé (incarné par Marins lui-même) ouvre la plupart de ses films par un préchi-précha mystico-cosmique où le cinéaste-acteur expose ses théories sur l'Homme, le cosmos et l'enfer. Tourné en douze jours dans une synagogue, A Meia-Noite raconte la quête de Zé (en fait, une série de torture à la fois gore et raffinées), parti à la recherche de la femme idéale qui portera son enfant. Au Brésil, le film remporte un immense succès et transforme Marins en culte vivant. Suivront d'autres cauchemars dont Esta Noite Encarnarei no teu Cadaver (1966), O Estranho Mundo do Zé do Caixao (The Strange World of Coffin Joe, 1968) et surtout Ritual dos Sadicos (1969), qui s'interesse à un groupe d'individus cherchant à experimenter la terreur via le L.S.D.. Au milieu du film, Marins imagine une émission de télévision dans laquelle il doit répondre de ses "oeuvres" devant une cour dite "de la vérité". Charlatan ou génie maudit, le jury doit trancher tandis qu'en voix off, le présentateur nous apprend que Glauber Rocha (auteur du Dieu noir et le Diable Blond - 1964 - et surtout chef de file du "nuovo cinema" brésilien) et Anselmo Duarte (auréolé à Cannes en 1962 de la Palme d'or pour O pagador de Promessas, Duarte appartient à une veine plus académique, garant d'une certaine "qualité brésilienne") "considèrent Zé do Caixao comme un artiste primitif et un authentique metter en scène". Objet déroutant et hybride, Ritual dos Sadicos évoque la période la plus iconoclaste de Bunuel (L'age d'Or et Viridiana surtout), le Ferreri de La Grande Bouffe, Lanuit des morts-vivants et le courant surréaliste (au début du film, une femme subit les avances crasseuses de son futur employeur, un clone bouffi de Zero Mostel, lequel prendra successivement l'apparence d'un porc, d'un chien et d'un cheval). Scato, hérétique, profondément antireligieux, Ritual s'achève dans une vision dantesque et en couleur d'un enfer dirigé par Zé.
Sadique moins esthète qu'un Jess Franco, plus poétique (certaines images de A Meia-Noite évoquent Franju), Marins est un artiste primitif, cadrant montrant, mixant ses films à la manière d'un illusionniste découvrant le septième art. Il y a chez lui un art inné du collage, quelque chose de Méliès (tous les trucs de substitution du magicien de Montreuil y passent), du Jodorowski première période (Fando y Lis et El Topo) et surtout Pasolini (Accatone) dans sa façon de capter frontalement ce qu'il filme (d'où la valeur documentaire et sociale de chacun de ses films) et de laisser la matière brute produire ses accidents (les corps transpirants, la misère des quartiers pauvres de Sao Paulo avec ses bordels miteux et ses clients ivres). Ses faux-raccords, ses récits peu orthodoxes, sa direction d'acteurs (forcément inéxistante) ne sont donc pas les simples conséquences de tournages fauchés (en ce sens, on est très loin de l'"esthétique" nanar des films d'Ed Wood), mais d'une volonté naïve et touchante (néo-réaliste ?) d'expérimenter les possibilités magiques du cinéma. Dans Finis Hominis, réalisé en 1970 et interdit 18 ans au Brésil, un homme (Marins lui-même) apparait sur la plage de Santos et sème le trouble dans la ville de Sao Paulo. Messie moderne (chaque scène du film revisite un épisode des Écritures), cet Antéchrist déguisé en fakir finit par délivrer sa Parole, tel Moïse, au sommet d'une colline, avant de franchir dans le dernier plan du film les grilles d'un sanatorium.[...]


Jean-Baptiste Thoret in Starfix #7, Juillet-Août 1999 - p50/51

source : Starfix

The Coffin Joe Collection

L'Étrange Festival s'est clôt dimanche soir, et nous continuons notre "after" festival avec un retour sur une grande rétrospective qui a eu lieu en 1999 autour du réalisateur culte Brésilien : José Mojica Marins et son personnage Zé do Caixão (Coffin Joe dans la langue de Shakespeare). Le coffret, en vente auprès de THE END est en VO (portugais) sous titré anglais et comprend l'intégralité des films (huit, sans compté Embodiment of Evil) et un documentaire The Strange World Of Mojica Marins réalisé en 2001.


Zé do Caixão, un croquemort nitzschéen dans l'âme, cherche la "femme parfaite" qui pourra donner naissance à l'être supérieur. Mais dans un petit village paumé du Brésil, où la population vit dans la peur permanente de la punition céleste, la quête de Zé n'est pas chose facile. D'autant plus qu'il abhorre tous ces paysans crédules, et que sa femme, Lenita, est stérile. Zé décide donc de l'éliminer afin d'avoir le champ libre pour conquérir Terezinha, la fiancée de son meilleur ami, Antonio. Terezinha refusant ses avances, Zé la viole après avoir fracassé la tête d'Antonio. Souillée, elle se suicide mais promet à Zé de revenir hanter son âme.

Blasphème, violence, sadisme À minuit, je posséderai ton âme est, à tout point de vue, une date dans l'histoire du cinéma. Premier film d'horreur brésilien. Première apparition de Zé do Caixão, le croquemort à longue cape, au chapeau haut-de-forme et aux ongles interminables. Premières échauffourées avec la censure pour José Mojica Marins ­ pas moins de dix minutes du film passeront à la trappe. Mais aussi coup de maître hallucinant ­ le film tiendra l'affiche deux ans durant à Sao Paulo. Un électrochoc dont les savantes provocations et les gifles délibérées aux traditions les plus ancestrales surprennent encore aujourd'hui. Anecdote : le film n'a rien rapporté à Marins, celui-ci ayant vendu les droits deux jours avant la première.

Sur «A MINUIT, JE POSSÉDERAI TON ÂME»
"L'inspiration du film m'est venu d'un rêve. J'ai rêvé qu'une figure étrange avec un chapeau-claque et une longue cape noire m'emmenait de force dans un cimetière. Dès que j'ai eu la possibilité de jeter un regard, j'ai vu qu'il me tirait vers une fosse béante. Lorsque j'ai vu le nom inscrit sur la tombe, j'ai hurlé d'effroi : c'était mon nom qui s'y trouvait. Puis, en me retournant vers la créature qui m'avait amené là, je me suis aperçu que cette créature c'était moi. En fait, je me jetais moi-même en Enfer. Le tournage de ce film a été un vrai cauchemar. Je n'avais que 130 minutes de négatif à ma disposition. Toute l'équipe traînait la patte parce que je n'avais pas assez d'argent pour les payer. L'acteur, que j'avais au départ choisi pour jouer Zé do Caixão, s'est carapaté à la dernière minute. J'ai donc pris sa place. Je devais tellement d'argent que j'ai du vendre la maison de mes parents ainsi que ma voiture. Les censeurs ont détesté le film. Ils ont surtout été outrés par la scène où Zé do Caixão mange de la viande un Vendredi Saint en regardant passer sous ses fenêtres une procession. Pour moi, évidemment, c'est une scène formidable".


Alors qu'on le croyait bel et bien mort, Zé ressuscite, recouvre la vue et part à nouveau en quête de la "femme parfaite". Toujours obsédé par sa volonté d'assurer la descendance d'une nouvelle humanité, il capture six femmes et les soumet à une série d'expériences pour mesurer leur courage. A l'exception de Maria, aucune d'entre elles ne satisfaisait aux critères de Zé. Il les condamne donc à la fosse aux serpents. Marcia a néanmoins trop de défauts pour que Zé en fasse la mère de son fils-Messie : elle est éperdûment amoureuse de lui et n'a aucune résistance à la cruauté. L'âme soeur, il la trouvera en la personne de Laura, la fille du Colonel. Laura n'a peur de rien, admire Zé et n'hésite pas à faire l'amour avec lui au moment même où les funérailles de son frère ont lieu. Mais, une fois encore, la malédiction de ses victimes va frapper Zé dans sa chair et son corps.

Suite directe de À minuit je posséderai ton corps, Cette nuit, je m'incarnerai dans ton cadavre est assurément l'un des sommets de la carrière de José Mojica Marins avec Le Monde étrange de Coffin Joe. La séquence en couleurs où Zé est littéralement traîné aux Enfers est la fidèle retranscription du rêve démiurgique qui inspira à Marins le personnage de Zé do Caixão. Cette nuit, je m'incarnerai dans ton cadavre reste encore aujourd'hui l'une des dix plus grosses recettes de tous les temps du cinéma brésilien. Le film a été entièrement tourné dans une synagogue abandonnée que Marins transforma en studio. Dans un espace dépassant à peine les 50 mètres carrés, Marins fit construire une forêt, un lac et un cimetière. Après le départ précipité d'une des actrices principales du film lorsqu'elle réalisa qu'elle devrait tenir un serpent entre ses mains, Marins décida de faire passer des tests à tous ses acteurs. Entre autres réjouissances, il leur demanda de lécher des crapauds, d'embrasser des serpents et de tenir dans leurs paumes des tarentules. À l'époque, la censure exigea que la séquence des Enfers soit coupée de moitié.

Sur «CETTE NUIT, JE M'INCARNERAI DANS TON CADAVRE»
» Lors d'une des scènes du film, les actrices devaient se retrouver couvertes de tarantules. Comme elles refusaient de tourner la scène, je les ai fait boire jusqu'à ce qu'elles soient complètement saoûles pour arriver à filmer cette séquence. Le résultat est merveilleux. Pendant le tournage, nombre d'événements étranges se sont déroulés. Mon assistant-chef opérateur mourût alors que nous tournions la séquence des Enfers. Ma vision des Enfers était un peu différente de la vision largement répandue: lors d'un des plans de la séquence, en effet, de la neige tombe. Certains critiques se sont émus de ce choix, ce qui m'a permis de leur demander s'ils avaient déjà fait un tour en Enfer pour connaître à ce point le sujet.


Un professeur, qui s'intéresse aux effets de la drogue sur toutes les couches sociales de la population, décide de mener une expérience à base de LSD sur quatre "cobayes" volontaires. L'analyse de leurs "trips" révélera leurs désirs et leurs frayeurs les plus enfouis.

Film à part dans la carrière de Marins, tout comme La Fin de l'humanité, L'Éveil de la Bête se veut une enquête sur les hippies et la contre-culture au Brésil. Mais c'est surtout une vision très noire d'une société qui cherche la Libération, au sens philosophique du terme. Séquence-clé du film: le délire psychédélique, surréaliste et en couleurs de nos quatre volontaires avec Zé comme maître de cérémonie. Voyant dans L'Éveil de la Bête une incitation à l'utilisation intensive de stupéfiants, le Comité de censure décida d'interdire purement et simplement la diffusion du film. Le négatif fut confisqué, et pendant de nombreuses années considéré comme perdu. La prohibition du film sonna la ruine de Marins, qui avait investi toutes ses économies dans cet opus. À ce jour, L'Éveil de la Bête n'a toujours pas connu de sortie commerciale au Brésil.

Sur «L'ÉVEIL DE LA BÊTE»
"C'est le film qui a failli me coûter ma carrière. Après Le Monde étrange de Coffin Joe, plus personne ne voulait produire l'un des mes films. J'ai donc fait appel à mes amis-réalisateurs pour récupérer de la pellicule négative. C'est la raison pour laquelle une partie du film est en noir et blanc et une autre partie en couleurs. Le Comité de Censure m'a traité de fou furieux après la vision du film. L'un de ses membres a même demandé mon arrestation. Avec L’Éveil de la bête, je cherchais juste à parler des effets dévastateurs de la drogue au sein de notre société, mais le Comité à penser que je faisais en fait un film politique, que c'était une métaphore sur la dictature militaire, ce que le film n'a jamais été.


Un homme étrange et nu sort des eaux, sauve une enfant sur le point d'être kidnappée et se retrouve habillé en fakir prêt à annoncer la "Bonne Parole". Miracle après miracle, Finis hominis devient un Messie, un prophète dont le gouvernement craint qu'il ne sème la graine de l'anarchie au sein de la population. Avant de disparaître, Finis hominis donnera une leçon d'altruisme au Brésil tout entier.

Tourné en même temps que sa suite, Quando os deuses adormecem, La Fin de l'humanité, dont dix minutes furent coupées par la Censure, marque la création d'un nouveau personnage cinématographique capital de l'histoire du cinéma brésilien. Mais c'est également une exploration comique du mysticisme et de ses conséquences.

Sur «LA FIN DE L'HUMANITÉ»
"C'est, de mes films, celui que je préfère. J'ai pris beaucoup de plaisir à le tourner, en particulier parce qu'on me disait incapable de réaliser autre chose qu'un film d'horreur. À l'époque, en outre, aucun producteur ne voulait me suivre sur une énième aventure de Zé do Caixão de peur de se retrouver face au Comité de censure. Du coup, j'ai décidé de créer un nouveau personnage. Finis hominis s'inspire de tous ces prêtres qui extorquent de l'argent aux pauvres, et qui abusent de la bonne foi d'autrui. Au Brésil, ces charlatans pullulent.


Episode 1 : Le faiseur de poupées. Une bande de brutes entend parler d'un faiseur de poupées plein aux as. Il débarque chez lui pour lui soutirer son pactole et tombe sur ses quatre nymphes de filles.

Episode 2 : Obsession. Un clochard tombe fou amoureux d'une jeune fille riche et inaccessible. Le jour de son mariage, sa meilleure amie assassine celle-ci par jalousie. La cérémonie funéraire achevée, le corps reste seul. Le clochard va enfin pouvoir consumer sa passion.

Episode 3 : Idéologie. Un scientifique, Oaxiac Odez, expose ses théories lors d'une émission télé. Agressé par un journaliste sceptique, il l'invite chez lui pour lui prouver le bien fondé de sa théorie sur l'Instinct contre la Raison.


Entre 1967 et 1968, Marins supervise deux shows télés qui connaîssent un succès considérable : Alem, muto alem do Alem (L'Au-delà et au-delà de l'Au-delà) et O Estranho mundo de Zé do Caixão (Le Monde étrange de Zé do Caixão). Sorte de Quatrième dimension brésilien, l'incroyable popularité de ces deux shows donne l'idée au producteur George Michel Serkeis d'engager Mojica pour réaliser un long métrage regroupant trois sketches inspirés de certains épisodes de ces shows. Le résultat ? Le Monde étrange de Zé do Caixão, une oeuvre radicale, subversive et gore, un manifeste sadien et buñuelien dont le point culminant est Idéologie, le troisième et dernier sketch, quintessence de toutes les obsessions de Marins. À noter que le Comité de Censure exigea que Zé meure à la fin du film.

Sur «LE MONDE ÉTRANGE DE ZÉ DO CAIXÃO»
"À l'époque, je supervisais un show télévisé intitulé Le Monde étrange de Coffin Joe, qui remportait un énorme succès. Un producteur est venu me vohttp://www.blogger.com/img/blank.gifir et m'a demandé de réaliser un long métrage incluant trois épisodes inspirés d'idées provenant de cette émission. J'aime beaucoup ce film, en particulier l'épisode central intitulé Obsession qui, selon moi, est une de mes œuvres les plus réussies. Le Comité de Censure a hai le film, comme il se doit, et l'a massacré. Le troisième opus, Idéologie, a tellement subi de coupes qu'il est devenu impossible de suivre l'histoire.


Les autres films disponibles dans le coffret sont
- Strange Hostel Of Naked Pleasures (1976)
- Hellish Flesh (1977)
- Hallucinations Of A Deranged Mind (1978)

source : étrange festival

L'Étrange Festival de Paris : jour 9 & 10

Deuxième et dernier week-end de l’Étrange, et retour sur nos quatre derniers films vus. Pour notre première édition parisienne, le bilan est plutôt mitigé, peut-être que nous n'avons pas fait les bons choix en sélectionnant nos films mais nous les assumons. Nous avons faits l'impasse sur la nuit Sushi typhoon (Helldriver, Yakuza weapon et autres délires réalisés ou supervisé par le maitre des effets spéciaux japonais, Nishimura), ainsi que sur bons nombres de films disponibles en dvd (Requiem pour un massacre, la chair et le sang,Hitcher)

samedi 10 septembre /Beyond the black rainbow / Drive / Cold Fish
C'est pour vivre des journées comme celle de samedi que nous sommes venus à l’Étrange Festival. Trois films originaux, trois visions pour le moins iconoclastes des genres. trois films dont un sera sans aucun doute notre film de l'année.


Au début des années 80, la tentative d’évasion désespérée d’une jeune femme séquestrée derrière une vitre dans un laboratoire expérimental, et surveillée par le mystérieux docteur Barry Nyle.

Nous sommes obligés de commencer notre commentaire par l'anecdote sur le pater du réalisateur de ce film de science fiction. Panos Cosmatos est le fils de Georges P. Cosmatos (1941-2005), metteur en scène de longs-métrages devenus cultes pour bon nombre de cinéphages (Rambo II, Cobra, D'origine inconnu, Leviathan ou Tombstone). Beyond the black rainbow est une véritable ode au genre, sorte de meta film, reprenant les codes, les ambiances des plus grand réalisateurs (Kubrick, Tarkovski, Cronenberg, Lynch) pour insuffler à l'image un parti pris esthétique pour le moins ambitieux. Accompagné d'une musique fonctionnant également sur le registre de la citation (Carpenter), Cosmatos a réussi à faire ce que Cattet et Forzani avait fait avec Amer, un film hommage original se démarquant grâce à un sens artistique authentique.


Shamoto tient une boutique de poissons tropicaux. Sa deuxième femme ne s’entend guère avec sa fille, Mitsuko, et cela lui fait peur. Un jour, prise en flagrant délit de vol dans un supermarché, Mitsuko va trouver en la personne de Mr Murata, non seulement un sauveur, mais aussi un homme exerçant le même métier que son père mais à grande échelle. Il poussera même la bonté jusqu’à lui offrir un travail dans son magasin. Mais Mr. Murata, sous ses manières attentionnées, cache de nombreux sombres secrets …

Deuxième film de Sono Sion projeté à l’Étrange, et deuxième réussites en l’occurrence. La force du réalisateur est de réussir à construire une histoire en crescendo provoquant sans cesse l'intérêt du spectateur. Le long-métrage repose, comme très souvent, sur l'opposition entre deux styles de vie, de monde ou de rang social, Sonio Sion développe son histoire par un effet miroir pour mieux illustrer les antagonismes des personnages mais également pour créer un choc visuel lorsque les identités se rapprochent au point de se confondre pour créer un big bang des plus sauvages. Le propre de Guilty of romance ou de Cold fish est d'être des moments de tension qui débouche vers un climax ultime, un point de non retour, ponctué d'acte de cruauté aussi bien psychologique que physique dont le spectateur ne ressors jamais indemne.


Un cascadeur tranquille se métamorphose dès que la nuit tombe : il devient pilote pour le compte de la mafia. La combine est bien rodée, jusqu’au jour où l’un des casses tourne mal et l’entraîne dans une course-poursuite infernale. Il veut se venger de ceux qui l’ont trahi…

Que dire, si ce n'est que Drive est le meilleur film que nous ayons vu à Paris durant la manifestation et également pour l'année 2011. Le dernier film de Nicolas Winding Refn (Bronson, Pusher, Valhalla Rising) est une véritable réussite et pas seulement la mise en scène dont il fut récompensé lors du dernier festival de Cannes mais à tous les niveaux artistiques, on touche au grand art. Débarrassé de ses oripeaux d'un certain cinéma d'auteur, Nicolas Winding Refn s'affirme davantage à travers cette œuvre de commande (destiné à la base au metteur en scène de The Descent et Doomsday, Neil Marshall). Canalisé par un scénario anémique tiré d'un polar du même nom (publié en français chez Rivages), le cinéaste danois donne toute la pleine de mesure de son talent, comme allégé d'une quelconque volonté de marqué le cinéma à tout prix par des effets de style. bien au contraire, c'est en (re)trouvant une simplicité (oublié depuis les Pusher) que le film gagne en beauté.

Sortie le 5 octobre 2011

Dimanche 11 septembre / La cloche de l'enfer
Un seul film en ce dimanche qui sonne la fin du festival pour nous. Nous finissons avec cette rareté franco espagnole signée Claudio Guerin (1939-1973) mort prématurément à la fin du tournage.


Juan est libéré sur parole d’un centre psychiatrique où il était interné depuis des mois. Il rend alors visite à sa tante qui l’a fait interner, et à ses trois cousines. Il décide également de s’installer dans la demeure de sa défunte mère dont l’héritage est en jeu. Juan met alors en place une machination vengeresse à l’égard de sa famille. Un plan démoniaque qui n’épargne personne.

Voici le film typique de la richesse de l’étrange festival, un film méconnu (jadis disponible à THE END en zone 1 sous titré en français), une fin tragique pour le réalisateur qui ajoute au caractère "mystérieux" du film, des images (d'abattoir) chocs et surprenantes, un humour noir décapant, rehaussé par un trio d'actrices somptueuses. Tout le charme d'un long-métrage hautement recommandable pour découvrir toute la richesse d'un cinéma fantastique ibérique des années 70 bien plus intéressant que la vague récente des productions Filmax / Fantastic Factory, enfin cela n'engage que nous.

L'Étrange Festival de Paris : Jour 8

Vendredi 9 septembre / Take Shelter / Tomie Unlimited
Les mauvais films ont ce pouvoir de vous faire réévaluer ceux vus précédemment. Et la vision du dernier film de la saga Tomie de Noboru Iguchi (2011), nous a permis d'apprécier davantage Take Shelter de Jeff Nichols (2011) et ce, malgré quelques longueurs.


Curtis LaForche mène une vie paisible avec sa femme et sa fille quand il devient sujet à de violents cauchemars. La menace d’une tornade l’obsède. Des visions apocalyptiques envahissent peu à peu son esprit. Son comportement inexplicable fragilise son couple et provoque l’incompréhension de ses proches. Rien ne peut en effet vaincre la terreur qui l’habite...

Faisant suite au Shotgun Stories, toujours inédit en dvd en France, Take Shelter confirme tous les espoirs que les critiques avaient mis dans son premier film. Le film vient de remporter le grand prix au festival de Deauville 2011 (présidé par Olivier Assayas) et avait déjà remporté le grand prix à Cannes (remis par Robert De Niro). Une récolte de prix, justifié pour un film à l'univers délicat et proposant une histoire simple en apparence mais à la construction brillante.
Lors de la sortie française de Shotgun Stories, le distributeur avait mis sur l'affiche "par un des dignes héritier de Terrence Malick", la filiation avec le cinéaste de Tree of Life est d'autant plus pertinente que l'on retrouve pour Take Shelter la même actrice, Jessica Chastain. En outre le film porte le même regard fasciné sur les phénomènes naturels, une vision à la limite du mystique. Seule la durée du film, nous a posé problème. Étendu sur 117 minutes, l’œuvre de Nichols prend le temps de développé chaque personnages en écho au trio familial, de façonné un univers cohérent mais la durée des plans, des séquences étirent le film bien plus que de raison. Peut-être qu'une seconde vision permettra d'apprécier l'ampleur du monde aussi angoissant que passionnant de Jeff Nichols.

sortie : 7 décembre 2011


L'histoire : Tsukiko et ses parents ne peuvent se résoudre à faire le deuil de Tomie, décédée quelques mois plus tôt. Le jour de son anniversaire, cette dernière réapparaît…

Après ce début de soirée réjouissant, Tomie s'annonçait comme une récréation horrifique dans la lignée de Ring et The Grudge, enfin c'est ce que nous pensions. Car c'était sans savoir que le responsable des effets spéciaux était Yoshihiro Nishimura, la tête pensante du label Sushi Typhoon et réalisateur de Tokyo Gore Police. Si son travail en tant que responsable des effets spéciaux et maquillage a fait ses preuves, nous ne faisons pas partie de ceux qui pensent que tout ce que touche Nishimura se transforme en chef d’œuvre. Comme tout créateur, il a des hauts et des bas, et Tomie Unlimited fait partie de ses travaux les moins intéressants. Après si vous aimez comme nous Basket Case et Elmer le remue méninge, certaines idées pourront vous faire esquisser un sourire car c'est définitivement vers le délire rigolo trash que le film tend et non l'épouvante des filles aux cheveux longs.

L'Étrange Festival de Paris : Jour 4/5/6/7

Lorsque nous avons commencé à commenter le festival, nous espérions dire des choses, à défaut d'être intelligentes, qui vous donnent envie de découvrir les films présentés sur les 10 jours de la manifestation. Naïfs comme nous sommes, nous n'avions pas envisagé que les films vus soient décevants, pour ne pas dire énervants, d’où notre silence de ces derniers jours.


Lundi 5 septembre / Soudain le 22 mai
Le Forum des images étant fermé, l’Étrange Festival a déménagé à Montreuil (Cinéma Le Méliès) le temps d'une soirée consacrée à Koen Mortier et à la carte blanche de Jean-Pierre Mocky (Viva la muerte /Fernando Arrabal).
Après la claque Ex Drummer, le second film du réalisateur belge énerve par ses postures "cinéma d'auteur" et même si le réalisateur se défend d'un quelconque calcul, son esprit chaotique et un accident de raccord seraient à l'origine de la narration éclatée, morcelée et racontée par les divers acteurs du drame, nous avons du mal à croire qu'il n'y a pas une quelconque préméditation. Seul le dernier quart d'heure nous a convaincu, le talent de Koen Mortier est bien (trop ?) visible et ce malgré son dispositif narratif (un agent de sécurité revit l'explosion d'une bombe en compagnie d'autres victimes) épuisant et répétitif.

Mardi 6 septembre / Meat / Clinic
Ce jour restera comme la pire journée du festival (et la seule ? nous l’espérons). Meat se révèle très rapidement sans intérêt oscillant entre le fantastique abscons et l’expérimental superficiel. Quant à Clinic, film d'horreur / fantastique australien, inspiré de faits réel, ne témoigne pas d'une grande originalité question mise en scène, et les personnages semblent tous évolués de manière caricaturales.

Mercredi 7 septembre / Super de James Gunn
Peut être le meilleur film vu depuis l'ouverture du festival, Super n'est pas un énième film d’antihéros, ni de super héros mais un drame à l'humour noir proprement (d)étonnant, avec un final alternant avec brio la comédie et l'émotion. Tout le film joue autour de cette ambivalence, drame d'un homme humilié par la vie et/ou comédie d'un homme qui devient un super-héros.
Super est un film vraiment Étrange pour le coup, laissant ce trouble intérieur d'avoir assisté à un film touchant, drôle mais également surprenant par son traitement premier degrés du héros (ennui, attente, fatigue, blessure, doute, tout le quotidien revu et corrigé par James Gunn) et de la violence engendré par ses actes. Déjà auteur d'un sympathique Slither (Horribilis en V.F.), James Gunn, issu de l'écurie Troma (Lloyd kaufman) prouve une nouvelle fois que l'on peut sortir des bas-fonds du cinéma et écrire pour Hollywood (Les Scooby-Doo) et réaliser des films indépendants de très bonne qualité.

Jeudi 8 septembre / Stake Land
A la vision du second long-métrage de Jim Mickle, beaucoup évoque Terrence Malick pour la présence de la nature, des champs de blé et du pollen dans les airs. Ceci est un sacré compliment tant le film n'arrive jamais à trouver l'ampleur métaphysique ou philosophique d'une œuvre du réalisateur américain. Le premier film de Jim Mickle, Mulberry Street (vendu en dvd avec Mad Movies) avait été une (plutôt) bonne surprise mais ce second effort s'avère plus laborieux. Le film est réussi techniquement mais les enjeux nous semblent bien trop vus et revus pour surprendre le spectateur (des femmes et des hommes tentent de survivre dans un monde post-apocalyptique livré aux vampires et autres créatures de la nuit).

Brain Dead | Arte Cinéma Trash

La semaine dernière lorsque nous avons vu le nom de Brain Dead nos yeux et notre cœur n'ont fait qu'un tour et nous pensions avoir la chance de (re)voir sur le réseau hertzien l'un des films cultes de Peter Jackson (Feebles). Encore une fois, THE END fantasme et démarre au quart de tour.
Le film de ce soir est bien Brain Dead et non Braindead de Peter Jackson, un espace qui fait toute la différence. Mais estimons-nous heureux et chanceux de pouvoir regarder un film du réalisateur de Carnosaur ! Ironique ou pas, présentation du film par Jenny Ulrich


Un neurochirurgien (Bill Pullman) est poussé par un ancien camarade d’université (Bill Paxton) –avec lequel il était en concurrence pour la femme qu’il a épousé- à tripatouiller le cerveau d’un mathématicien mentalement dérangé (Bud Cort) détenant une formule capitale pour la nébuleuse entreprise Eunice. L’opération a lieu. Puis la vie de notre brillant docteur part en vrille.

Si vous avez été sensibles aux références faites par le réalisateur Adam Simon, dans ce premier film, au « Re-Animator » (1985) de Stuart Gordon et au « Schock Corridor » (1963) de Samuel Fuller, repenchez-vous à l’occasion sur ces deux classiques –sur le second surtout, puisque Simon a consacré un documentaire à Fuller, « La machine à écrire, le fusil et le cinéaste » (1996). Si c’est la progressive mais radicale perte de repères entre rêves, réalité et folie qui vous a plu dans « Brain Dead » (1990, d’abord exploité en France sous le titre « Sanglante paranoïa »), voyez le contemporain « L’échelle de Jacob » (1990) d’Adrian Lyne ou les plus récents « Shutter Island » (2010) de Martin Scorsese et « Inception » (2010) de Christopher Nolan. Si vous avez été impressionnés par la performance de Bud Cort, acteur passionnant mais malchanceux (un grave accident a grandement perturbé sa carrière, du coup on se souvient essentiellement de lui dans « Harold et Maude » (1971) de Hal Ashby), suivez-le dans son unique film en tant que réalisateur, « Ted & Venus » (1991). Si c’est Adam Simon et son lien avec l’horreur qui vous intéressent, on ne va pas forcément vous renvoyer vers son « Carnosaur » (1993), mais plutôt vers le documentaire où il donne la parole aux grands maîtres du genre, « The American Nightmare » (2000). Enfin, si quand vous entendez « Brain Dead » vous pensez illico à Peter Jackson, rien ne vous empêche de vous reprendre une bonne dose de ce joyeux délire gore qu’est « Braindead » (1990) !


Jenny Ulrich

Ma chère Jenny, nous aurions aimé (comme beaucoup d'autre) qu'il s'agisse du Jackson plus que du Simon. Peut-être une autre fois.

> jeudi 8 septembre 2011 à 00H15
> samedi 10 septembre 2011 à 01H35

source : Arte

Out of the Blue | Dennis Hopper (1980)

Précédemment édité par Bach Films, dans leur collection Serial Polar, Out of the Blue se voit offrir une nouvelle édition plus... luxueuse.



Présentation de l'éditeur
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Don (Dennis Hopper), un camionneur alcoolique et désabusé, a percuté un bus rempli d’enfants. Tandis qu’il purge une peine de prison, Katie (Sharon Farrell), sa femme, se réfugie dans la drogue et les bras d’autres hommes, et Cindy (Linda Manz), sa fille, multiplie les fugues et ne jure que par Johnny Rotten, le chanteur des Sex Pistols. Lorsqu’il est libéré, Don tente d’impulser un nouveau départ à une famille anéantie. Mais les démons du passé ressurgissent…

Balade rock’n’roll des laissés pour compte du rêve américain, Out of the Blue est la tempête qui surgit, dix ans après, dans le ciel bleu d’Easy Rider (1969). Les paroles lancinantes de la chanson de Neil Young, Hey Hey My My, ont donné son titre à ce film mythique, véritable concentré de « no future », dont les héros déchus nous réservent un final en forme d’apothéose nihiliste.

Bonus :
Nouveau master : 1.85 – 16/9
Version originale avec nouveaux sous-titres français
Entretien avec Dennis Hopper (93 min)
Présentation du film par François Guérif (9 min)
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Au revoir le boitier plastique, bonjour le digibook ! Alors que certains films peinent à être éditer en France, d'autres ont la chance de se voir disponible dans plusieurs éditions. Ne boudons pas notre plaisir de pouvoir posséder une (très) belle édition de ce somptueux film du regretté Dennis Hopper (1936-2010).

Out of the Blue suinte la douleur par tous les ses pores. La façon dont Dennis Hopper y déploie une incroyable dimension masochiste est déjà étonnante, comme si son personnage aimantait de lui-même malheur et chagrin. Mais le prix du film est aussi dans l’antidote qu'il secrète contre le déterminisme parfois pataud de son propre récit.
Contrebalançant un scenario qui n'y va pas de main morte dès qu'il agite les spectres de l'alcoolisme, de la drogue et de l'inceste, la mise en scène de Hopper joue une carte erratique qui privilégie les moments de fugue adolescente et oes échappées nerveuses aux passages obligés du mélodrame. Passé plutôt inaperçu à l'époque ce film pose rétroactivement au culte pour plusieurs raisons. D'abord pour la jeune Linda Manz, révélée par les Moissons du Ciel, qui campe ici une pure égérie punk-rock et qu'on ne reverra ensuite que dans Gummo d'Harmony Korine. Ensuite, pour son nihilisme qui l'érige au titre du "film le plis no future du cinéma américain". Enfin, pour la sublime ballade de Neil Young Hey, Hey, My, My, véritable scénario secret d'un film qui ne cesse d'explorer le terrible refrain : "it's better to burn out than to fade away". Une décennie après Easy Rider, cette comète noire confirme Hopper en barde désenchanté qui sait que même auprès des hippies et des punks, seul le blues est éternel.
Joachim Lepastier in Cahiers du Cinéma #670, p.61

Prix : 17 euro

Pour commander, envoyez un mail à theendstore@gmail(DOT)com, paiement par paypal ou par chèque

ArrowDrome, de l'érotisme et du giallo

Même si les deux nouveaux ArrowDrome sont disponibles dans notre beau pays, nous ne résistons pas à vous dévoiler les jaquettes toujours aussi graphiques de Tokyo Decadence (1991) et L’oiseau au plumage de cristal (1969).


Sam Dalmas est un écrivain américain. Venu habiter à Rome en espérant pouvoir y vivre de sa plume, il doit très vite déchanter et se résoudre à écrire des ouvrages de vulgarisation pour gagner sa vie. Il est environ minuit à Rome. Il rentre chez lui, parcourant une rue déserte où seule une galerie futuriste est éclairée. Distraitement, il y jette un coup d'œil, puis s'arrête brusquement, et se précipite: au fond de la galerie, un homme vêtu de noir et une jeune femme luttent sauvagement, l'éclat d'un couteau brille entre eux... Essayant de lui porter secours, il est piégé par les deux portes automatiques de la galerie d'art et ne peut qu'observer pendant que l'assaillant s'enfuit. La police arrive sur les lieux du drame et cherche vainement l'issue choisie par l'agresseur pour fuir. Suspicieuse, elle confisque le passeport de Sam…

Sorti en blu-ray en juin dernier toujours chez Arrow, L'oiseau au plumage de cristal de Dario Argento fait son apparition en dvd dans la collection ArrowDrome. En ce qui concerne cette édition, le nombre de bonus est nettement inférieur à celui de l'édition blu-ray puisque celle-ci comportait les compléments suivants :

A Crystal Classic: Luigi Cozzi Remembers Dario’s Bloody Bird
Sergio Martino: The Genesis Of The Giallo
The Italian Hitchcock: Dario Argento Remembers The Bird With The Crystal Plumage
Exclusive collector’s booklet featuring brand new writing on the film by Alan Jones, author of Profondo Argento
Four sleeve art options with original and newly commissioned artwork;
Two-sided fold-out poster.


Pour l'édition dvd, nous aurons droit à une interview de Dario Argento et un livret signé Alan Jones, auteur de "Profondo Argento".


Ai, jeune Japonaise romantique, rêve du grand amour. Pour conquérir l'homme de sa vie, une voyante lui conseille de porter une topaze rose au doigt. Ai est aussi une call girl spécialisée dans le sadomasochisme, une perle qui se soumet aux désirs les plus extravagants de sa clientèle... Tokyo Decadence est la récit de sa dérive dans une capitale japonaise secrète, violente et folle, où la volonté de puissance et d'enrichissement menacée par l'ombre du krach n'est tempérée que par une recherche éperdue du plaisir. Dans cette société décadente où tout est rapport de force, Ai semble nous dire, à l'instar du Marquis de Sade, que "tout, dans la vie, est affaire de délicatesse".

L'édition de Tokyo Decadence, film du scénariste d'Audition de Takashi Miike, ne comporte qu'un un livret de Robin Bougie (Cinema Sewer) et des bande annonce de la collection ArrowDrome. C'est toujours plus qu'en France ou le film possède deux éditions mais aucune ne proposent de véritable bonus. Et pourtant il y aurait beaucoup de chose à dire sur le réalisateur / écrivain Ryu Murakami.

Romancier punk depuis 1977, il a réalisé cinq films depuis 1980. Topazu est son quatrième. Murakami réussit comme personne à construire une petite heure d'apologie du bondage et de la strangulation, du bruit du vibro et du silence après, de la goutte rouge sang perlant sur le bras entre deux filaments spermeux. Pour cela, en génie du casting, il a choisi pour camper la prostituée Ai la fragile Miho Nikaido, actrice et épouse d'Hal Hartley. Soumise au film comme quelqu'un qui n'attend, pour exister, qu'une raison supplémentaire de souffrir, embarquée dans les rêves des autres, elle endure sans piper mot cet enfer reptilien, lentement déroulé, défoulé et effeuillé comme un catalogue. Entre autres apogées de la caresse, le chic de la dissolution du monde étant ici de boire à l'arrière d'une voiture du champagne en mangeant des asperges, tout cela pour aider la montée du shoot. J'aime ce film humoristique pour ses mauvaises raisons. Il propose à cette actrice possible un http://www.blogger.com/img/blank.gifprogramme limpide : se tenir blanche et droite comme un peuplier dans un porno capitaliste.
Philippe Azoury in Les Inrockuptibles

Enfin pour terminer, si vous ne le savez pas, lors des émeutes du mois dernier à Londres, un entrepôt qui abriter une partie des stocks d'Arrow Films a été détruit par les flammes. Certaines éditions blu-ray et dvd seront épuisées prochainement... avis aux collectionneurs.
Following the riots in north London which left the Sony distribution centre smouldering, this senseless attack has unfortunately meant that Arrow stock along with that of many distributors went up in flames. We are working hard to ensure that new stock is manufactured as soon as possible. At this juncture we will be changing some of our releases. Arrow Video DVD versions of Dawn of the Dead, Day of the Dead, A Bay of Blood, Deep Red and Battle Royale will not be reprinted but will be re-issued as ArrowDrome releases.

L'Étrange Festival de Paris : Jour 2 & 3

Premier week-end et premières grosses journées pour les festivaliers avec la Nuit Grindhouse (Hobo with the shot gun, Tucker & Dale fightent le mal, Norwegian Ninja et le documentaire The Grindhouse, next generation du journaliste Didier Allouch) et une quinzaine d'autres long-métrages. Faute de budget extensible (pourquoi pas de pass festival ?), nous avons décidé de retenir deux films : The Woman, le nouveau Lucky McKee (May) et Kill List de Ben Weathley (Down Terrace, toujours inédit en France).


Quand un avocat capture et tente de "civiliser" une "femme sauvage", rescapée d’un clan violent qui a parcouru la côte nord-est des États-Unis pendant des décennies, il met la vie de sa famille en danger.

LE film choc du Festival, celui qui sent le souffre, après un passage remarqué à Sundance, The Woman n'aura pas l'effet escompté sur nous. En effet, si le film bénéficie d'une excellente direction d'acteur, d'une mise en scène dynamique et d'une musique pop rock, le long métrage par son humour déconnecte de la souffrance des personnages. Il est même très dommageable pour la crédibilité de l'ensemble que le gore prennent le pas sur l'humour et sur les non-dits, qui jusqu'alors réussissaient à créer une atmosphère inquiétante et pesante. Des mystères qui se diluent au fil de l'intrigue, des effets gores pour contenter le fanboy en mal d'hémoglobine et The Woman de lucky McKee perd de sa sauvagerie, de son intellects (la femme sauvage aurait pu être le catalyseur des frustrations des femmes de la maison et ne sert finalement que de prétexte à la libération de leurs conditions). En définitive, une très bonne série B qui aurait pû gagner davantage en conservant des zones d'ombres.


Huit mois après un travail désastreux à Kiev qui l’a laissé physiquement et mentalement marqué, Jay, un ex-soldat devenu tueur à gages, est pressé par son partenaire d’accepter une nouvelle mission. Très vite, Jay commence à ressentir à nouveau les effets de la peur et de la paranoïa...

Les zones d'ombres sont nombreuses dans le second long-métrage de Ben Weathley, et ce, pour notre plus grand plaisir. A l'instar des autres films vus à l’Étrange Festival, l'humour (noir, so british) est encore très présent dans ce film. Un second degrés qui joue en permanence le contre pied et le talent du réalisateur est de jouer, jusqu'au dernier quart d'heure, sur le fil d'un réalisme social (réseau pédophile ?) et de répliques caustiques venant soulager le spectateur de la violence de certaines images. Le film pourra laisser beaucoup de personnes sur leurs faims, nous, nous avons aimer être mener par le bout du nez, jusqu'au titre final venant sceller un film intriguant. Nous ne pouvons en dire plus sans risquer de vous gâcher le plaisir de découvrir ce film.

The Proposition, film maudit ?

Les Voies du marché dvd sont impénétrables...

La "malédiction" autour du film The Proposition (2005) de John Hillcoat semble continuée. Après une sortie salle en 2009 - la France était sans aucun doute le dernier pays à offrir ses écrans au film - The Proposition, auréolé d'une presse dithyrambique, semblait destiné à alimenter les chaines du câbles ou cryptées (lieu de la première diffusion du film), les festivals, les cinémathèques, ou pire, tombé dans l'oubli.

Quelle ne fut pas notre surprise de voir le "dvd" du film offert contre l'achat de 5 dvd (offre du type 5 dvd pour 30 euro) dans les Virgin megastore. Mais quelle fut notre tristesse lorsque nous eûmes le dit objet entre les mains. Oubliez les digipacks cartonnés ou les fourreaux, non rien de tout cela, juste une simple pochette de cd single pour l'un des plus beau western de ces dix dernières années. Proposé en VO (5.1), VF (Dolby Digital) sous titré français, le film est accompagné en bonus d'un making of.

Nous ne pouvons que déplorer un tel mépris de la part de Sony (France ?) envers ce film rassemblant des noms prestigieux (Guy Pearce, John Hurt, Emily Watson), un scénariste (Nick Cave) à la popularité mondiale et à un réalisateur à la reconnaissance grandissante (John Hillcoat).

Pour ceux qui ne connaissent pas ce western, rappel des faits.


Dans l'arrière-pays australien, à la fin du XIXème siècle, deux hommes situés aux deux extrémités de la loi passent un marché secret et décisif...
Le Capitaine Stanley s’est juré de « civiliser » le pays sauvage australien. Ses hommes ont capturé deux des quatre frères du gang Burns : Charlie et Mike. Les bandits ont été jugés responsables de l'attaque de la ferme Hopkins et de l'assassinat de toute une famille. Arthur, le plus âgé des frères Burns et chef du gang, s'est réfugié dans la montagne. Le Capitaine Stanley propose alors un marché à Charlie : retrouver son frère aîné en échange de son pardon, et de la vie sauve pour le jeune Mike. Charlie n'a que neuf jours pour s'exécuter...


Nous aurions pu compiler l'ensemble des critiques pour témoigner de la qualité du long-métrage mais nous préférons vous faire lire ce texte de John Hillcoat, écrit avant le tournage de The Proposition, traduit par Jean-Loup Bourget, et publié dans Positif en décembre 2009. Une note d'intention qui, si elle n'exprime pas toute la poésie du film, contribue à comprendre les enjeux du film.

Il y a très longtemps que je souhaite réaliser un western australien. En 1994, j'ai longtemps voyagé dans l'intérieur du pays, traversant quatre états différents avec mon production designer, Chris Kennedy. la puissance dynamique du paysage sauvage et son histoire brutale m'ont convaincu que le western australien, c'est-à-dire un drame situé sur la Frontière à la fin du XIXe siècle avec le rude courage caractéristique du genre, restait à créer.
De nombreux films australiens sont partis d'événement réels, traitant l'histoire de façon purement factuelle, sans parvenir à évoquer le potentiel mythique de la période.
Jusqu'à une date récente, on considérait que le western américain était un genre épuisé et oublié, condamné au purgatoire cinématographique. Le récit de Nick Cave, The Proposition, contient certains éléments traditionnels du Far West, et propose une fable classique de frères hors-la-loi qui vient sur une frontière sauvage. Ce sont des personnages flamboyants, en lutte contre un destin contraire. Tel le héros westernien archétypique et laconique, plusieurs des personnages de Cave répriment leur douleur intime, et, incapables de verbaliser leurs émotions, ils proposent d'autres solutions au conflit, mais sont inéluctablement entraînés vers la violence.
Il était possible de réinventer le pouvoir légendaire du genre, mais dans un contexte spécifiquement australien. Lorsqu'il s'agit de réinventer le genre, les mythes existants ne sont détruits que pour permettre la création de nouveaux mythes. pour être revitalisés, l'histoire et le genre ont toujours eu besoin d'un angle nouveau. L'impérialisme colonial, avec la violence de sa lutte de classes, la confrontation des colons isolés avec les broussards hors-la-loi, le conflit sans merci avec les aborigènes, l'instinct de survie - tous ces thèmes ne peuvent qu'ajouter à l'originalité du récit. The Proposition utilise l’énorme potentiel de l'Australie, avec son histoire et son paysage extraordinaires, tout en proposant des personnages et des situations qui sont susceptibles d'intéresser n'importe quel public. Les personnages ne sont pas simplement bons ou méchants, ils sont pleins d’ambiguïtés et de contradictions comme dans la réalité ; même le monstrueux Arthur, une figure horrible à la Kurtz (dans Au Cœur des ténèbres de Conrad), a des éclairs de loyauté, d'humour et d'humanité. En même temps, le récit a des résonances mythiques car il puise dans les traditions du genre et travaille avec elles.
La brutalité était évidente dans toutes les tentatives de "civiliser" les nouvelles frontières du XIXe siècle, Impitoyables et crasseux, les personnages de Peckinpah et de Leone ont rendu leurs westerns plus crédibles et plus physiques en offrant des relectures décapantes d'un passé édulcoré. La férocité nue de l'époque permet un réalisme accru, une intensification de la réalité qui souligne toutes les vérités gênantes qui avait été maquillées jusqu'ici, qu'il s'agisse des témoignages accablant de la bassesse de notre nature humaine ou des détails des épidermes non rasés, luisants de sœur et infestés de mouches. La frontière australienne, tell qu'elle est dépeinte dans The Proposition est encore plus extrême et dangereuse que celle de l'Ouest américain. La terre était encore plus inhospitalière et les hors-la-loi encore plus dangereux et désespérés, car ils n'avaient pas de Mexique où se réfugier, et pas un seul hors-la-loi n'a échappé à la capture ou à la mort précoce. Les représentants de l'Empire britannique, comme Stanley et surtout Eden Fletcher, régnaient sans partage et se montraient sans pitié dans leur traitement des indigènes.
Les photos prises à l'époque révèlent le refus obstiné des victoriens d'accepter la vérité de la Frontière. Ils exportaient leur Empire, leur Angleterre, jusque sur les terrains les plus récalcitrants, les plus inappropriés, comme l'attestent les maisons avec leur petite pelouse et leur barrière, cernées par le vaste désert stérile qui menace de tout recouvrir. La rudesse du nouvel environnement était littéralement gravée sur leurs visages.
John Hillcoat

Maintenant ils ne vous restent plus qu'à trouver 5 dvd pour acquérir une perle rare.

L'Étrange Festival de Paris : Jour 1

Premier jour, premières séances. Découverte du forum des images, ses méandres, ses recoins et ses salles. Sans le vouloir, notre sélection de films avaient plus de point communs qui n'y parait.


El Infierno - Luis Estrada (2010)
Benjamín, un émigré mexicain qui après avoir passé 20 ans de prison aux États-Unis, est reconduit dans son Mexique natal qui s’apprête à fêter les 200 ans de son indépendance et les 100 ans de la révolution. Mais il n’en croit pas ses yeux : ses proches sont tous trempés de près ou de loin dans le trafic de drogue et le pays a sombré dans la violence et la corruption. Très vite, Benjamín n’a d’autre choix que de se mettre sous la coupe du chef de la drogue de “San Miguel (N)Arcangel”, petit village près de la frontière américaine. Mais tout ne va pas se passer comme prévu...


Guilty of Romance - Sono Sion (2011)
Izumi est mariée à un célèbre romancier romantique mais leur vie semble n'être qu'une simple répétition sans romance. Un jour, elle décide de suivre ses désirs et accepte de poser nue et de mimer une relation sexuelle devant la caméra. Bientôt, elle rencontre un mentor et commence à vendre son corps à des étrangers, mais chez elle, elle reste la femme qu'elle est censée être. Un jour, le corps d'une personne assassinée est retrouvé dans le quartier des "love hôtels". La police essaie de comprendre ce qui s'est passé.

Ces deux films, bien que séparés par un océan entretiennent un dialogue pertinent sur l'influence de nos sociétés sur notre comportement, comment nos us et coutumes canalisent nos personnalités jusqu'à la rupture.
El Infernio peut être vu comme un énième "Rise & Fall" à la Scarface ou à la American Gangster, l'attrait du film réside dans sa touche "Mexicano". C'est-à-dire grosse moustache, musique Mariachi, Tequila et brune incandescente. L'autre particularité (et sa force) est l'humour noir envers tout ce "cinéma". Chaque personnage n'est pas dupe de sa fin et rare sont qui s'en sortent vivant. Le plan final rajoute une pierre contre le gouvernement Mexicain sur l'impossibilité du pays à pouvoir s'en sortir dans un pays gangrené par la corruption et les narcotrafiquants. Bref, quelques images fortes pour un discours à charge contre les autorités Mexicaine mais en définitive, le film reste un divertissement anodin et ce malgré les polémiques qu'il a pu engendrer dans son pays.
Guilty of Romance est une plongée vertigineuse dans les tréfonds de l'identité d'une personne asservi par des années de soumission à son mari. Comme pour El Infierno, le réalisateur joue avec les codes du pays pour mieux les dynamiter et les faire voler en éclat. Avec sa narration éclatée et sa durée de 2h20, Guilty of Romance fait l'effet d'un tourbillon qui vous aspire, qui vous tire vers la noirceur de l'âme humaine. On retrouve, mais en plus petite dose, un humour très noir, pour ne pas dire morbide qui participe au malaise et au trouble. L'affiche du film avec ses miroirs brisés sont autant de vies éparpillées, de reflet d'une société ankylosé d'un passé bien trop lourd pour les nouvelles mentalités.