---------------------------------------------------------------------------------------------------

The Proposition, film maudit ?

Les Voies du marché dvd sont impénétrables...

La "malédiction" autour du film The Proposition (2005) de John Hillcoat semble continuée. Après une sortie salle en 2009 - la France était sans aucun doute le dernier pays à offrir ses écrans au film - The Proposition, auréolé d'une presse dithyrambique, semblait destiné à alimenter les chaines du câbles ou cryptées (lieu de la première diffusion du film), les festivals, les cinémathèques, ou pire, tombé dans l'oubli.

Quelle ne fut pas notre surprise de voir le "dvd" du film offert contre l'achat de 5 dvd (offre du type 5 dvd pour 30 euro) dans les Virgin megastore. Mais quelle fut notre tristesse lorsque nous eûmes le dit objet entre les mains. Oubliez les digipacks cartonnés ou les fourreaux, non rien de tout cela, juste une simple pochette de cd single pour l'un des plus beau western de ces dix dernières années. Proposé en VO (5.1), VF (Dolby Digital) sous titré français, le film est accompagné en bonus d'un making of.

Nous ne pouvons que déplorer un tel mépris de la part de Sony (France ?) envers ce film rassemblant des noms prestigieux (Guy Pearce, John Hurt, Emily Watson), un scénariste (Nick Cave) à la popularité mondiale et à un réalisateur à la reconnaissance grandissante (John Hillcoat).

Pour ceux qui ne connaissent pas ce western, rappel des faits.


Dans l'arrière-pays australien, à la fin du XIXème siècle, deux hommes situés aux deux extrémités de la loi passent un marché secret et décisif...
Le Capitaine Stanley s’est juré de « civiliser » le pays sauvage australien. Ses hommes ont capturé deux des quatre frères du gang Burns : Charlie et Mike. Les bandits ont été jugés responsables de l'attaque de la ferme Hopkins et de l'assassinat de toute une famille. Arthur, le plus âgé des frères Burns et chef du gang, s'est réfugié dans la montagne. Le Capitaine Stanley propose alors un marché à Charlie : retrouver son frère aîné en échange de son pardon, et de la vie sauve pour le jeune Mike. Charlie n'a que neuf jours pour s'exécuter...


Nous aurions pu compiler l'ensemble des critiques pour témoigner de la qualité du long-métrage mais nous préférons vous faire lire ce texte de John Hillcoat, écrit avant le tournage de The Proposition, traduit par Jean-Loup Bourget, et publié dans Positif en décembre 2009. Une note d'intention qui, si elle n'exprime pas toute la poésie du film, contribue à comprendre les enjeux du film.

Il y a très longtemps que je souhaite réaliser un western australien. En 1994, j'ai longtemps voyagé dans l'intérieur du pays, traversant quatre états différents avec mon production designer, Chris Kennedy. la puissance dynamique du paysage sauvage et son histoire brutale m'ont convaincu que le western australien, c'est-à-dire un drame situé sur la Frontière à la fin du XIXe siècle avec le rude courage caractéristique du genre, restait à créer.
De nombreux films australiens sont partis d'événement réels, traitant l'histoire de façon purement factuelle, sans parvenir à évoquer le potentiel mythique de la période.
Jusqu'à une date récente, on considérait que le western américain était un genre épuisé et oublié, condamné au purgatoire cinématographique. Le récit de Nick Cave, The Proposition, contient certains éléments traditionnels du Far West, et propose une fable classique de frères hors-la-loi qui vient sur une frontière sauvage. Ce sont des personnages flamboyants, en lutte contre un destin contraire. Tel le héros westernien archétypique et laconique, plusieurs des personnages de Cave répriment leur douleur intime, et, incapables de verbaliser leurs émotions, ils proposent d'autres solutions au conflit, mais sont inéluctablement entraînés vers la violence.
Il était possible de réinventer le pouvoir légendaire du genre, mais dans un contexte spécifiquement australien. Lorsqu'il s'agit de réinventer le genre, les mythes existants ne sont détruits que pour permettre la création de nouveaux mythes. pour être revitalisés, l'histoire et le genre ont toujours eu besoin d'un angle nouveau. L'impérialisme colonial, avec la violence de sa lutte de classes, la confrontation des colons isolés avec les broussards hors-la-loi, le conflit sans merci avec les aborigènes, l'instinct de survie - tous ces thèmes ne peuvent qu'ajouter à l'originalité du récit. The Proposition utilise l’énorme potentiel de l'Australie, avec son histoire et son paysage extraordinaires, tout en proposant des personnages et des situations qui sont susceptibles d'intéresser n'importe quel public. Les personnages ne sont pas simplement bons ou méchants, ils sont pleins d’ambiguïtés et de contradictions comme dans la réalité ; même le monstrueux Arthur, une figure horrible à la Kurtz (dans Au Cœur des ténèbres de Conrad), a des éclairs de loyauté, d'humour et d'humanité. En même temps, le récit a des résonances mythiques car il puise dans les traditions du genre et travaille avec elles.
La brutalité était évidente dans toutes les tentatives de "civiliser" les nouvelles frontières du XIXe siècle, Impitoyables et crasseux, les personnages de Peckinpah et de Leone ont rendu leurs westerns plus crédibles et plus physiques en offrant des relectures décapantes d'un passé édulcoré. La férocité nue de l'époque permet un réalisme accru, une intensification de la réalité qui souligne toutes les vérités gênantes qui avait été maquillées jusqu'ici, qu'il s'agisse des témoignages accablant de la bassesse de notre nature humaine ou des détails des épidermes non rasés, luisants de sœur et infestés de mouches. La frontière australienne, tell qu'elle est dépeinte dans The Proposition est encore plus extrême et dangereuse que celle de l'Ouest américain. La terre était encore plus inhospitalière et les hors-la-loi encore plus dangereux et désespérés, car ils n'avaient pas de Mexique où se réfugier, et pas un seul hors-la-loi n'a échappé à la capture ou à la mort précoce. Les représentants de l'Empire britannique, comme Stanley et surtout Eden Fletcher, régnaient sans partage et se montraient sans pitié dans leur traitement des indigènes.
Les photos prises à l'époque révèlent le refus obstiné des victoriens d'accepter la vérité de la Frontière. Ils exportaient leur Empire, leur Angleterre, jusque sur les terrains les plus récalcitrants, les plus inappropriés, comme l'attestent les maisons avec leur petite pelouse et leur barrière, cernées par le vaste désert stérile qui menace de tout recouvrir. La rudesse du nouvel environnement était littéralement gravée sur leurs visages.
John Hillcoat

Maintenant ils ne vous restent plus qu'à trouver 5 dvd pour acquérir une perle rare.

Aucun commentaire: