Disponible en dvd depuis 2008 chez l'excellent éditeur Chalet Pointu, Mondo Hollywood (1967) est un mondo devenu culte par son interdiction (temporaire) en France comme en Californie. Son côté sulfureux vient également des apparitions de Bobby Beausoleil, bien connu des admirateurs de Kenneth Anger ou de Charles Manson et de tous un tas de freaks comme de vedette de cinéma, et ce, pendant plus de 120 minutes psychédéliques. L'évocation de ce dvd, nous permet également de rappeler l'existence de l'(excellent) ouvrage de Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud, Mondo Movies et films cannibales, Reflets dans un œil mort, indispensable pour quiconque s’intéresse à ce phénomène aujourd'hui disparu (quoique, on retrouve dans certains shows de télé-réalité ou certaines émissions des réminiscences des Mondo qui jadis faisaient scandales, là, où aujourd'hui cela est anecdotique) et sur l'évolution des mœurs à travers le monde.
Tourné entre 1965 et 1967, ce documentaire underground est un film culte sur le Hollywood des années 60 : acteurs, sportifs, LSD gourous, hippies, musiciens, danseuses, travestis...Considéré comme une "prophétie bizarre" par la critique, un film "pro-communiste" pour la CIA, "donnant une image trop flatteuse du capitalisme, trop de voitures et de piscines" pour les communistes, interdit en 1968 en France pour apologie de perversités, incluant la drogue et l'homosexualité, ce film est un témoignage dune société en pleine mutation morale. Avec des apparitions de Frank Zappa, Sean Connery, Brigitte Bardot, Alfred Hitchcock, Ronald Reagan... mais aussi Bobby Beausoleil, membre de la "Manson family" (aujourd'hui en prison pour meurtre) et Jay Sebring coiffeur des stars, victime de Charles Manson.
Supplément : interview de Robert Carl Cohen (80mn)
En bonus, THE END vous propose (dans un but informatif et pour la promotion de l'ouvrage) la chronique de Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud extraite de Mondo Movies et films de Cannibales.
Mondo Hollywood (1967) de Robert Carl Cohen est un (autre) objet cinématographique non identifié mais dont le montage survitaminé et le psychédélisme jubilatoire en font un témoignage passionnant et unique sur les États-Unis des années 60, même si son action se déroule exclusivement à Hollywood.
Robert Carl Cohen commence dans le documentaire à la fin des années cinquante et après avoir filmé la Chine, l'Allemagne ou Cuba, il se décide avec ce projet d'enfin retourner vers ses origines et d'aller à la recherche des personnalités les plus excentriques du lieu où il a grandi. Il part d'un principe simple : il y mettrait tous les êtres les plus hors normes et les plus insolites qu'il rencontrera et leur fera narrer leurs propres scènes, dans un principe de volontariat et de liberté d'expression. Personne ne sera payé, aucune ligne de dialogue n'est écrite, et Cohen, lui, se charge de monter tout ce qu'il récoltera sur bobines.
Muni d'une camera 24 heures sur 24, il se fait le témoin de ce Hollywood de la fin des années soixante, excentrique, tourné vers la culture surf et les acides. Le tournage commence en septembre 1965 et dure jusqu'en mai de l'année 1967 mais, comme il le stipule lui-même dans un entretien avec Don Wrege, son attitude diffère de celle de Jacopetti lorsqu'il fit Mondo Cane : "J'ai fait de mon mieux pour capturer l'esprit de la ville à cette époque, un esprit qui n'existe plus. Hollywood est très différente aujourd'hui. Je n'ai pas essayé d'aller chercher ce que vous appelleriez "l'obscène". Mondo Cane fut le premier à utiliser le spectacle Mondo aux Etats-Unis.[...] J'ai donc essayé de montrer le monde Hollywoodien, alors que dans Mondo Cane , ils recherchaient le sensationnel. Je n'essayais pas de rendre Hollywood sensationnel, elle l'était déjà assez !".
Il n'a pas besoin d'aller chercher l'insolite, l'insolite est partout à Hollywood. De plus, en se faisant passer pour un journaliste de la chaine Monte Carlo TV (qui n'a d'ailleurs jamais existé), il a pu avoir accès à des séances exceptionnelles et on trouve dans son film de nombreuses personnalités : d'Alfred Hitchcock à la Reine Elizabeth, de Frank Sinatra à Brigitte Bardot, de Dean Martin à Robert Mitchum, de Telly Savalas au couple Elizabeth Taylor/Richard Burton, de Michael Caine à Anthony Quinn, de Jayne Mansfield à Charlton Heston, de Steve McQueen à Rock Hudson, etc. Plusieurs séquences font aujourd'hui partie de l'histoire comme la conférence de presse de Ronald Reagan, sans parler de la présence de Frank Zappa avant même qu'il ait sorti son premier album. En effet, comme dans tous les autres Mondo Movies américains de cette époque, la musique y est un élément majeur, assuré ici par des formations qui allaient par la suite devenir cultes comme Davie Allan & the Arrow ou The Mugwumps et d'autres noms comme The Raphaels. Il faut savoir que les personnalités choisies pour figurer dans le film ont-elles mêmes par moment assuré les chants et les parties musicales des épisodes les concernant.
Dans sa sélection, Robert Carl Cohen avait appliqué trois critères qu'il a suivi à la lettre : que ce soit quelque chose qui représente totalement Hollywood, son rêve et ses illusion, que la personne choisie soit inhabituelle et fantasque, et qu'elle soit dans le rêve Hollywodien. Il a donc retenu en vrac et entre autres Gypsy Boots, un écolo déjanté, Lewis Beach marvin III, un millionnaire qui vit avec un singe et so nchien, margaretta Ramsey, une actrice, Vito, un musicien hippy excentrique, Mr & Mrs White, un couple aisé, Dale E. Davis, un surfeur, Valérie Porter, une ancienne actrice de films de série B, Estella Scott, une femme de ménage, Sheryl Carson, une esthéticienne, Carol Cole, la fille de Nat King Cole, Richard Alpert, un psychologue, Helen White, une star du cinéma muet, ainsi que des sportifs, go-go danseuses, travestis ou accros aux amphétamines.
Comme d'autres films de l'époque, tel Medium Cool par exemple, il faut recadrer cette œuvre dans son contexte et dans les bouleversements qui déchiraient les États-Unis à ce moment-là : les manifestations anti-Vietnam, le mouvement des droits civiques, l’émergence très forte de la contre-culture avant qu'elle ne montre sa face la plus sombre. Il est d'ailleurs à noter que Bobby Beausoleil, un des personnages du film, a travaillé pour Kenneth Anger avant de commettre des crimes avec les disciples de Charles Manson et d'être incarcéré à vie. On y retrouve aussi un coiffeur, Jay Sebring, qui fut assassiné par la bande de Manson.
Mais ceux qui attendent de voir un Mondo dans la lignée italienne, avec des scènes terribles, seront décontenancés car il ne demeure ici qu'un désir de faire un cinéma libre, sans tabous, sans interdit. Du coup, les censeurs critiqueront le fait que, selon eux, le film fait l'apologie de la drogue mais, comme Cohen le dit lui-même, ce n'est pas sa faute si "à n'importe quel endroit où je mettais la caméra, la culture de la drogue était présente". Des éléments très Mondo demeurent néanmoins : en pur héritier du plan choc à la Jacopetti, Cohen passe de culturiste leveurs de poids à une femme qui coupe une tranche de viande. S'ajoutent des scènes de foules, des matches de foot ressemblant à des grandes messes nazies, des cracheurs de feu et un goût pour les freaks, une visite d'un musée du sexe, une évocation des sexualités taboues, etc. Le montage, quant à lui se délecte dans le gros plan et les effets psychédéliques.
En 1968, le film fut invité pour ouvrir le Festival du film d'Avignon, le ministère de l'information interdira instamment le film pour des raisons qui semblent bien absurdes aujourd'hui : "Apologie d'un certain nombre de perversités, parmi lesquelles les drogues et homosexualité... Un danger pour la santé mentale du public par son agression visuelle et la psychologie de son montage". Trois années plus tard, en 1971, le ministère français de la Culture enlèvera l'interdiction " en raison des changements profonds" apportés au film. Rien ne fut changé mais Mondo Hollywood gardera une réputation sulfureuse, notamment en Californie où il fut interdit deux fois et accusé de "pornographie".
Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud in Mondo Movies et films cannibales, Reflets dans un oeil mort (2010) page 67 à 70.
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Mondo Movies et les films de cannibales. Reflets dans œil mort de Sébastien Gayraud et Maxime la chaud. Mondo movies et films de cannibales. Deux genres qui n'en sont qu'un, à mi chemin entre le documentaire et le film d'horreur. De Mondo cane (1962) à Cannibal holocaust (1980), plus de vingt ans d'images-choc, de polémiques, de scandales. Un cinéma du XXe siècle, inconnu, mystérieux. Ici, les explorateurs se perdent dans la jungle, fusils et caméras aux poings. Ici, le monde entier est un spectacle et la vie et la mort sont authentiques. Authentiques, vraiment ? Où se termine la réalité et où commence la fiction? De l'Italie à la France, en passant par les États-Unis, une fascinante cinématographie parallèle, véritable panorama de l'étrange. De L'Amérique insolite jusqu'à La France interdite, de Mondo Hollywood jusqu'à Face à la mort, un voyage aux frontières de l'extrême. Reviendrez-vous de ces continents perdus ? - 368 pages, 30 euros. Disponible auprès de THE END (à commander à theendstore@gmai(POINT)com
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